Premières lignes (41)

Dans ce rendez-vous hebdomadaire, organisé par Ma Lecturothèque, je vous ferai part des premières lignes de romans qui me font considérablement envie…


Pour cette semaine, j’ai décidé de vous présenter les premières lignes du roman « Voler à tout Perdre », tome 1 de la série « Thieves’ Gambit », écrit par Kayvion Lewis et édité chez PKJ !

Thieves' Gambit, tome 1 : Voler à tout Perdre

« Un Quest ne doit faire confiance à personne. Sauf à un autre Quest. Donc, quand un Quest (en l’occurrence Maman Quest) me demanda de me contorsionner comme un rouleau de réglisse pour entrer dans un buffet si exigu qu’il serait illégal d’en faire une niche à chihuahua, je lui fis confianceElle avait forcément une bonne raison de m’infliger une chose pareille. En tout cas, ce que je m’apprêtais à voler en valait sûrement la peine. Une personne normale n’aurait plus senti ses jambes depuis longtemps. Il fallait croire que les séances intenses d’assouplissements imposées par Maman n’étaient pas si inutiles que ça. Cela faisait près de trois heures que j’étais coincée là, dans une aile perdue du manoir, à scroller sur mon faux compte Insta. Ces derniers mois, j’étais devenue tellement accro aux profils dédiés à la vie sur les campus que je ne regardais même plus de séries coréennes sur Netflix. Je dus arrêter à minuit ; il ne me restait plus que vingt pour cent de batterie. Maman l’avait pourtant précisé : je ne devais pas utiliser mon téléphone sans raison. Si je ratais son texto, j’étais foutue. Alors je me contentai de me tapoter la cuisse du bout de mes doigts gantés. Soudain, mon écran s’alluma. Une notification. À : Rosalyn Quest, invitation au Trophée Ce n’était pas le message de Maman. Un e-mail ? Enfin une réponse de l’un des stages de gym auxquels j’avais postulé ? Ou du club de pom-pom girls ? Quelques jours plus tôt, au milieu de la nuit, j’avais écrit à tout un tas de facs pour tenter d’intégrer les cursus qu’elles proposaient pendant l’été. Ces derniers temps, je me sentais plus seule que jamais, et la perspective de passer plusieurs semaines dans l’effervescence d’un campus avec d’autres ados de mon âge m’avait semblé très alléchante. Mais les responsables ne s’étaient peut-être pas laissé berner par les relevés de notes bidon que j’avais bidouillés fiévreusement. Alors que j’allais ouvrir le message pour en savoir plus, une nouvelle notification apparut. Cette fois, c’était Maman. À croire qu’elle me donnait une tape virtuelle sur la main pour me détourner de cette distraction. À toi de jouer. L’e-mail attendrait. J’entrouvris le buffet en prenant soin de soulever légèrement la porte pour empêcher les charnières de grincer. Un truc tout bête, que j’avais appris avant même d’être en âge d’écrire mon prénom. Je risquai un œil à l’extérieur. Le couloir était désert. D’après les repérages de Maman, il n’y avait jamais personne dans cette partie du manoir, l’équipe de domestiques qu’elle avait infiltrée passait le plus clair de son temps à astiquer les vases des appartements privés situés dans l’autre aile du bâtiment. Cette zone était la moins surveillée. Je passai comme une ombre devant des chambres aux lits à baldaquin faits au carré, aux bibliothèques épurées et aux tables de nuit nues. Le silence absolu avait quelque chose d’inquiétant, mais j’étais habituée aux maisons désertes. Il m’aurait suffi de fermer les yeux quelques secondes pour me croire chez moi, à Andros. Grâce aux plans que j’avais mémorisés, je pus rejoindre un salon au premier étage, où une commode recouverte de cadres photo attira mon attention. Dans les autres pièces, il n’y avait rien de si…Personnel. J’attrapai l’un des cadres. Un groupe d’étudiants posaient en souriant sur les marches d’un bâtiment de brique rouge. En bas du cliché, quelqu’un avait ajouté d’une écriture soignée, Première année. Des souvenirs. Des amis. Voler cette photo ne m’aurait rien donné de tout ça. Si je voulais mettre la main sur ces trésors, je devrais aller les conquérir. Loin de chez moi. Loin de Maman. Un bruit presque imperceptible me mit en alerte. Je reposai le cadre avant de plonger derrière un canapé. Accroupie dans le noir, je déroulai mon arme favorite. La tribu Quest se méfie des pistolets ; pas assez discrets. Maman ne sort jamais sans son couteau, et elle m’a raconté que Mamie avait autrefois une collection de seringues remplies de sédatifs ultra-rapides qu’elle maniait avec autant de dextérité qu’un chef étoilé son moulin à poivre. Comme je n’étais pas à l’aise à l’idée de transpercer qui que ce soit avec un poignard ou une aiguille, j’avais opté pour un bracelet météore. Les longues chaînettes d’acier qui le composent s’enroulent très facilement autour de mon poignet, et la lourde bille de métal à peine plus grosse qu’une cerise suspendue à leur extrémité se loge à la perfection sur la bague magnétique glissée à mon majeur. Contrairement à une lame, cette arme passe sans encombre les contrôles de sécurité et, entre mes mains, elle est tout aussi efficace qu’un couteau. Moins létale, certes. Le bruit de pas s’approchait. »

J’espère vous avoir donné envie d’y jeter un œil et je vous dis à la semaine prochaine pour découvrir de nouvelles premières lignes…

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