Premières lignes (62)

Dans ce rendez-vous hebdomadaire, organisé par Ma Lecturothèque, je vous ferai part des premières lignes de romans qui me font considérablement envie…


Pour cette semaine, j’ai décidé de vous présenter les premières lignes du roman « Tout me ramène à Toi », écrit par Mélissa Wiesner et édité chez Michel Lafon !

Tout me ramène à Toi

« Quand bien même, elle savait que sa réserve frustrait Gabe, parfois. Elle lui jeta un autre coup d’œil furtif tandis qu’il attrapait son sac à dos. Cela faisait quatre ans qu’elle ne l’avait pas vu. À présent, à mi-chemin dans sa trentaine, il avait gagné quelques petites rides autour des yeux, et bien que toujours mince, il s’était un peu épaissi depuis son départ. Bien sûr, il n’en était que plus attirant. Il se retourna et la surprit en train de le fixer. Quelque part au loin, un bourdonnement s’éleva, très léger d’abord, augmentant peu à peu en intensité. Pendant une seconde, Anna pensa que c’était le carrousel à bagages qui avait été actionné, mais non. C’était juste elle ; cette sensation diffuse d’électricité qui gagnait ses membres quand elle était près de Gabe. Si elle en croyait le léger tressaillement au coin de son œil, il ressentait la même chose, lui aussi. Tout d’un coup, elle fut transportée quatre ans en arrière, lors de cette soirée de juin où elle l’avait vu pour la dernière fois. Elle les revit, tous les deux sous le porche des parents de Gabe, et entre eux un abîme plus vaste que l’océan qu’elle venait de traverser. Elle revit l’expression stupéfaite et peinée sur le visage du jeune homme alors qu’elle s’était dérobée, ayant de justesse manqué de franchir la limite. Fuyant son regard, elle se pencha pour prendre sa veste et fouiller ses poches comme si l’urgence était soudainement de mettre la main sur son passeport. Gabe poussa un soupir discret, teinté d’exaspération cette fois encore. Pour la millionième fois depuis cette orageuse nuit de printemps où elle avait quitté le pays, elle se demanda quelles conséquences le temps et la distance avaient eu sur les sentiments de Gabe à l’égard de cette dernière rencontre. Était-il, lui aussi, soulagé qu’ils se soient arrêtés avant que quelque chose ne se passe entre eux ? Et tout aussi désolé ? Elle ne lui poserait jamais la question. Ils parlaient de tout. De tout sauf de cette ligne à haute tension qui vibrait entre eux. Ce sujet était définitivement défendu, totalement tabou. Parce que s’il y avait une chose plus précieuse que tout le reste pour Anna, un trésor qu’elle aurait protégé quitte à se jeter sous un train en marche, c’était son amitié avec Gabe. C’était la seule chose dans sa vie sur laquelle elle avait jamais pu compter. »

À la semaine prochaine pour découvrir de nouvelles premières lignes !

4 réflexions au sujet de « Premières lignes (62) »

Laisser un commentaire