Premières lignes (50)

Dans ce rendez-vous hebdomadaire, organisé par Ma Lecturothèque, je vous ferai part des premières lignes de romans qui me font considérablement envie…


Pour cette semaine, j’ai décidé de vous présenter les premières lignes du roman « La Cité Oubliée », écrit par Hermine Lefèbvre  et édité chez Scrinéo !

La Cité Oubliée

« La ville de parchemin s’anima en un reflet parfait de la réalité. Fasciné, Lauro avait l’impression de voler au-dessus du labyrinthe des îles et des canaux de Venezia. Les façades splendides des palazzi se réfléchissant dans l’eau, mais la plus belle restait celle du palais des Doges, avec son marbre blanc et sa verrière aux joints d’or étincelante. À côté, un hippocampe couronné de soleil veillait sur la ville du haut de son campanile. Puis venait le grand pont de verre du Rialto, brillant comme les diamants que volaient sa mère et ses complices. Et lui aussi, bientôt. À genoux sur sa chaise, concentré pour ne pas bouger, Lauro glissa un regard vers son père, qui étudiait la carte magique avec soin. Il fronça les sourcils comme lui dans l’espoir d’apercevoir un détail qui leur avait échappé. Leurs cheveux blonds se mêlaient presque. Mais face aux murs d’encre qui ne révélaient jamais leurs mystères, un pli déçu finissait toujours par marquer son front et cette fois ne fit pas exception. Lauro voulut poser sa main sur la sienne en un geste de réconfort, mais il dut se pencher : son père s’était déplacé du côté de son bras plus court. À cause d’une malformation, il s’arrêtait à quelques centimètres de son coude. Même si sa mère disait que c’était impossible et que les légendes n’existaient pas pour de vrai. Celle-ci était différente. Il y avait très longtemps, une première Venezia avait été construite entre terre et mer. Puis, elle avait été engloutie par les eaux et la ville actuelle avait été bâtie sur ses ruines dont personne n’avait jamais découvert la moindre trace. À présent, la mention de l’Antique Venezia ne tirait qu’un léger haussement d’épaules un peu moqueur aux habitants de la lagune. Mais son père, lui, croyait à son existence au point d’y consacrer sa vie et Lauro était sûr qu’il ne se trompait pas. Il adorait l’entendre lui raconter la légende. « Imagine, disait-il, imagine une cité à côté de laquelle celle-ci n’est que peu de chose. Imagine la magie qui la baignait tout entière et offrait à ses habitants un pouvoir inégalé sur les forces de la nature. Imagine l’harmonie entre les Venezians et les Êtres sous la lagune… » Et Lauro imaginait l’or et le marbre, les créatures imposantes qui se prélassaient dans des canaux d’eau limpide et la puissance magique qui magnifiait la ville comme un soleil perpétuel. Elle vivait sous ses paupières, hantait ses rêves et il se réveillait souvent en ayant l’impression de l’avoir visitée. Seulement, l’harmonie n’avait pas duré, puisque, d’après son père, c’était une dispute entre les Venezians et les Êtres de l’eau qui avait provoqué la disparition de l’Antique Venezia. Son père frôla l’un des symboles inscrits dans un coin de la carte. Elle redevint inerte et il la roula, révélant en dessous la copie dépourvue de magie qu’il en avait faite. Lauro frétilla. Elle était si précieuse et si ancienne que son père ne sortait jamais avec, sauf lorsqu’il était sur une piste sérieuse. »

J’espère vous avoir donné envie d’y jeter un œil et je vous dis à la semaine prochaine pour découvrir de nouvelles premières lignes…

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