Dans ce rendez-vous hebdomadaire, organisé par Ma Lecturothèque, je vous ferai part des premières lignes de romans qui me font considérablement envie…
Pour cette semaine, j’ai décidé de vous présenter les premières lignes du roman « La Mémoire des Chimères », écrit par Céline Chevet et édité chez Scrinéo !

« Un gémissement trop peu humain. Un bruit mou. N’y tenant plus, Lyodeul virevolta. L’horreur se composa une figure. Montagne de formes abjectes, noires et luisantes. Elle dominait le corps ployé de son frère, l’étouffait sous sa masse grouillante. L’un des sabres battait l’air, le second résistait aux attaques de griffes et de dents qui visaient le cou. À bout de souffle, Cadeul se débattait. La gorge déchirée par l’effroi, Lyodeul sortit ses courtes lames et cria. Il se jeta dans la mêlée. La créature réagit. La créature ? Non. Les dizaines de bêtes d’obscurité qui se mouvaient de concert. Leurs longues pattes s’étirèrent vers l’enfant.Le hurlement brisé de son frère le figea dans sa course. Cadeul disparut sous l’amas informe dans un bruit de succion infecte. Des monstres se dirigèrent vers Lyodeul, tombant des hautes branches, surgissant d’un buisson. Saisi d’une terreur viscérale, l’enfant lâcha ses armes et déguerpit. Ses yeux embués le rendaient aveugle. Sa trachée brûlait sous les sanglots. Ses poumons menaçaient d’éclater. Il glissa, se redressa, plongea, ignorant la souffrance, la repoussant au loin. La peur lui donnait des ailes. Quand Lyodeul retrouva la verte végétation, il savait que les mines n’étaient pas loin. L’imposante statue de l’Angelle-totem protégeait l’entrée du tunnel. Redoublant d’efforts, la poitrine lancinante, il se jeta au pied de la sculpture, souleva la trappe et sauta dans le puits. Puis il se plaqua contre la paroi pour tendre l’oreille quelques secondes. Les plus longues secondes de sa vie. Le bruit de l’eau avait cessé. Les créatures ne le poursuivaient plus. Il était enfin seul. Horriblement seul. Un bourdonnement sourd enfla dans son esprit tandis qu’il serrait les paupières. Il voulait entendre des pas. Il voulait entendre Cadeul surgir dans sa cachette. Le gronder ou l’embrasser. Le silence n’avait jamais été aussi terrible. Comme un écho à la statue qui gardait l’entrée, une peinture de l’Angelle-totem occupait le mur : une salamandre géante à quatre yeux dont Lyodeul et tous les siens avaient hérité la peau et le sang. Elle le fixait à présent avec intransigeance. Les larmes de l’enfant redoublèrent. S’il descendait le long de cette galerie, il finirait par tomber sur l’un des trous secondaires de la mine, là où sa tribu résidait. Le lieu qu’il n’aurait jamais dû quitter. Il fallut que son cœur ralentisse pour que l’effarement déferle en lui. Expulsant une gerbe de bile, il cracha ensuite toute la rage qu’il possédait encore. Les paupières closes, les paumes enfoncées dans les orbites, Lyodeul ne pouvait pas fuir l’image atroce de son frère en train de se faire dévorer. La culpabilité le rongeait. Il serra les genoux contre sa poitrine, prit sa tête entre ses bras tremblants et commença à prier l’Angelle-totem. Ton poison est notre médecine, ton feu, notre foyer. Salamendor, Salamendor, tes enfants te rendent grâce pour ta protection. Qu’en abondance, tu abreuves nos maisons. Salamendor, Salamendor, tes enfants te rendent grâce pour ta protection…Tes enfants te rendent grâce pour ta protection… »
À la semaine prochaine pour découvrir de nouvelles premières lignes !
Le mot chimère a toujours tendance à retenir mon attention sur les couvertures et en plus, je sais que l’éditeur offre parfois de très belles surprises. Bref je suis intriguée.
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Je suis entièrement d’accord avec toi !
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Comme quasiment tous les livres de la ME, il est dans ma wish list 🙂 Merci pour cet extrait.
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Avec grand plaisir 😉
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