Premières lignes (53)

Dans ce rendez-vous hebdomadaire, organisé par Ma Lecturothèque, je vous ferai part des premières lignes de romans qui me font considérablement envie…

Pour cette semaine, j’ai décidé de vous présenter les premières lignes du roman « Tisseurs de Sorts », écrit par Frances Hardinge et édité chez Gallimard Jeunesse !

« Si vous devez vous rendre au pays de Raddith, préparez-­vous soigneusement. Apportez une moustiquaire pour les plaines, et un manteau chaud pour les collines et les montagnes. Si vous prévoyez de visiter la forêt marécageuse et noyée de brume qu’on appelle les Sauvages, vous aurez besoin de bottes solides et imperméables. (Vous aurez aussi besoin d’astuce, de courage et de chance, mais il y a des choses qu’on ne peut pas mettre dans ses valises.) Quand votre bateau arrivera au grand port de Mizzleport, n’oubliez pas d’échanger vos pièces d’or contre les hideuses pièces en acier de Raddith. Ne vous offusquez pas si les douaniers vous examinent à l’aide de lentilles serties dans des pierres ou vous inspectent avec des brosses métalliques. La prudence est de mise, en ces lieux où terre et mer se rencontrent. Ne faites pas attention aux escrocs qui essaieront de vous vendre des amulettes contre les sorts. Bien entendu, vous avez appris qu’il y avait à Raddith des gens capables d’ensorceler leurs ennemis. Ces histoires semblaient si pittoresques, quand vous les lisiez chez vous, on aurait dit des contes de fées. Toutefois, en écoutant les mises en garde terrifiantes des vendeurs, vous commencerez sans doute à vous sentir nerveux. Même s’il paraît bien inutile de gaspiller de l’argent pour une amulette soi-disant protectrice, il est probable que vous en achèterez une. Les escrocs tenteront peut-être aussi de vous vendre, à vous et aux autres touristes, des liasses de parchemins qu’ils prétendront être des cartes des Sauvages. (Il est impossible de cartographier vraiment les Sauvages. Mais achetez-en une, au cas où.) En parcourant Mizzleport, vous constaterez rapidement qu’aucun habitant ne porte d’amulettes contre les sorts. Votre aubergiste se moquera gentiment de vous pour en avoir acheté une. Cela dit, si vous lui demandez par quel moyen vous pourriez vous protéger efficacement, il haussera les épaules sans rien proposer d’utile. Les clients de l’auberge natifs de Raddith répondront volontiers à quelques-unes de vos questions. Les ensorceleurs existent-ils réellement ? (Oui.) Les sorts peuvent-ils vraiment mettre le feu à leur victime, la priver de son ombre ou la transformer en un essaim d’abeilles ? (Oui.) Est-il vrai que des araignées sont à l’origine du pouvoir des sorts ? (Non, les Petits Frères ne sont pas des araignées, même s’ils leur ressemblent beaucoup.) Dans ce cas, que sont ces Petits Frères ? Vos nouveaux amis vous parleront non sans affection de ces créatures aux multiples pattes qui vivent à la cime des arbres couverts de toiles d’araignées des Sauvages. Elles semblent avoir de la sympathie pour les tisserands et les artisans. Elles recherchent ­également les gens consumés par la rage ou la haine, auxquels elles offrent un sort. Ce sort se niche alors dans l’âme de son hôte comme un œuf pas encore éclos, jusqu’au moment où il a suffisamment grandi en puissance pour que l’ensorceleur puisse l’infliger à un ennemi. Essayez de ne pas poser la question qui vous brûle alors les lèvres : Ne faudrait-il pas faire quelque chose ? Pourquoi n’exterminez-vous pas ces créatures pareilles à des araignées pour empêcher les gens de devenir des ensorceleurs ? Si vous la posez, tout le monde autour de vous sera embarrassé. On vous expliquera qu’on ne peut pas écraser les Petits Frères comme de vulgaires araignées. En outre, toute tentative pour s’en prendre à eux provoquerait la colère des Sauvages. »

J’espère vous avoir donné envie d’y jeter un œil et je vous dis à la semaine prochaine pour découvrir de nouvelles premières lignes…